Dans un avis rendu ce mardi, l’autorité sanitaire insiste sur la nécessité « de réduire l’exposition de la population aux nitrates et nitrites par des mesures volontaristes en limitant l’exposition par voie alimentaire ». Elle recommande notamment de mieux définir les « doses journalières admissibles » (DJA) de ces substances, historiquement utilisées par les charcutiers pour allonger la durée de conservation des produits et prévenir le développement de bactéries pathogènes.
L’Anses a analysé les publications scientifiques en cancérologie parues depuis les travaux de référence de l’Efsa (2017) et du CIRC (2018). Elle confirme l’existence d’une association entre le risque de cancer colorectal et l’exposition aux nitrites et/ou aux nitrates, qu’ils soient ingérés par la consommation de viande transformée, ou via la consommation d’eau de boisson. Plus l’exposition à ces composés est élevée, plus le risque de cancer colorectal l’est également dans la population.
D’autres risques de cancers sont suspectés mais les données disponibles ne permettent pas, à ce jour, de conclure à l’existence d’un lien de causalité. L’Agence recommande de poursuivre les recherches dans ce domaine afin de confirmer ou d’infirmer ces relations.
Niveaux d’expositions, valeurs de référence et leviers d’action
En France, toutes sources d’exposition confondues, près de 99 % de la population ne dépasse pas les doses journalières admissibles (DJA) établies par l’Efsa et jugées pertinentes à ce jour pour les nitrates d’une part et les nitrites d’autre part. Pour prendre en compte les risques liés à la co-exposition, l’Anses a utilisé une démarche dite MOE (évaluation des marges d’exposition). Cette démarche conduit à des résultats analogues à l’analyse par les DJA pour une large majorité de la population. Pour autant, l’Agence recommande de mener une réflexion pour établir une valeur toxicologique de référence globale incluant nitrates et nitrites compte-tenu de leur transformation en composés nitrosés.
Alors que les limites d’expositions sont majoritairement respectées, les expositions sont néanmoins associées à la formation de composés augmentant la probabilité de cancers. C’est pourquoi l’Agence considère que l’ajout intentionnel des nitrites et des nitrates dans l’alimentation doit se faire dans une approche « aussi bas que raisonnablement possible ». Des leviers existent pour la mettre en œuvre.
Réduire les additifs dans les charcuteries : à chaque type de produit sa solution
Dans les charcuteries, l’ajout de nitrates et de nitrites vise notamment à limiter le développement des bactéries à l’origine de maladies comme la salmonellose, la listeriose ou le botulisme. Selon l’Agence, la réduction de leur utilisation aussi bas que raisonnablement possible peut être envisagée à la condition impérative de prendre des mesures pour maîtriser le risque de contamination par ces bactéries par d’autres moyens. Ces mesures devront être adaptées à chaque catégorie de produits. Par exemple, pour le jambon cuit, la réduction des nitrites pourrait s’accompagner du raccourcissement de la date limite de consommation. Pour le jambon sec, cela supposerait un contrôle strict du taux de sel et de la température au cours des étapes de salage, de repos et d’affinage du produit.